Nous poursuivons notre voyage dans les terres les plus septentrionales du globe. 79 ° Nord, 1000km du Pôle Nord, dernières terres habitées avant la banquise. 

Jour 4 : Krossfjorden

Le Krossfjorden « Baie de la Croix » doit son nom au baleinier anglais Jonas Poole érigea une croix à l’entrée du fjord en 1610. C’est depuis ce fjord, que débute notre randonnée du jour. Le temps est maussade, franchement mauvais le matin, ce qui nous oblige à décaler notre sortie à l’après-midi. L’environnement est ultra sauvage, la météo aux couleurs polaires.

Notre randonée du jour nous a permis de voir encore une quantité incroyable d’oiseaux marins qui nidifient le long des hautes falaises : des colonies de guillemots, de macareux, des grands labbe, des sternes arctiques, des eiders qui vivent en couple, des bruants et des pingouins… Tous ce petit monde cohabite dans un bruit et une cohue indescriptibles.

De retour de notre rando, Arthur nos conduit dans un endroit hors du temps et complètement improbable, le Lloyds Hotel dans le Mollerfjorden. Il s’agit d’un refuge construit pas des Allemands en 1926 pour les navigateurs en perdition dans la région.

Des expéditions y passent encore et y laissent des sortes d’ex-voto. Cet endroit complètement anachronique a un réel parfum de bout du monde.

Certains ont même trinqué sans trop savoir avec quel type d’alcool et de quel année… 

Jour 5 : Krossfjorden encore

À notre retour sur le bateau, Arthur nous a emmener naviguer au plus près du front du glacier Lilliehöökbreen. Après quelques temps nous nous retrouvons à une centaine de mètres du glacier.

Le bateau coupe ses moteurs tout en continuant d’avancer. Il ne nous reste plus que le bruit de la glace qui cogne sur la coque. À mesure que l’on approche, les morceaux de glace qui se sont décrochés de glacier sont de plus en plus gros. On peut y voir des oiseaux, des phoques barbus. Le front du glacier est haut de plusieurs dizaines de mètres et très impressionnant. On peut distinguer différentes strates de glace, probablement d’un âge ancien.

Sur le pont du bateau, nous sommes tous impressionnés d’une telle grandeur hors norme de la nature. Pourtant, c’est bien ici que je prend encore plus conscience de sa fragilité… Ici l’homme n’est pas à sa place et pourtant il a un impact sur la fonte des glaciers. Celui-ci a, parait-il diminué de moitié en moins d’un siècle!!

Nouvelle rando dans le Krossfjorden qui recèle de sommets et d’itinéraires. Une nouvelle fois nous sommes éblouis et impressionnés par les paysages avec une impression de bout du monde, voire fin du monde tellement le plafond nuageux est bas. Tout est gris en nuances infinies, y compris la mer dont on dirait une gigantesque plaque de métal.

L’impression de désolation est totale. Si l’on ne parle pas, le silence aussi est de plomb… jusqu’à ce que nous croisions une colonie d’oiseaux qui vient rétablir l’équilibre. Il y a bien de de la vie au Spitzberg, souvent très discrète, parfois débordante avec la faune aviaire.

Aujourd’hui, nous avons réussi à observer un renard argenté. Seul sur cette étendue de neige et de glace, avec encore son pelage d’hiver qui lui sert de camouflage, il aurait été impossible de le voir sans jumelles.

Nous l’avons vu trottiner, marcher jusqu’à ce qu’il se confonde avec la neige et que nous ne puissions plus le distinguer. Gros sentiment de plénitude pour lui qui était dans son environnement habituel et d’isolement pour nous. 

le Lilliehöökbreen est un glacier présentant un front de glace en arc de cercle de 7 km de long.

Durant ces 100 dernières années ce glacier a fortement régressé, comme l’attestent, paraît-il, certaines photos de l’expédition du Prince Albert Ier de Monaco en 1906, et celles, en comparaison, de son arrière-arrière petit-fils le Prince Albert II en 2006. Il aurait perdu 40 % de son volume de glace durant cette période.

Les autres glaciers du Krossfjord ont reculé également fortement, laissant derrière eux de larges paysages morainiques. 
Au nord du fjord, le glacier Liliehöökbreen rejoint 30 km plus loin le Raudfjordbreen.

Jour 6 : Ny-Alesund

Ny-Alesund est la ville la plus au Nord du monde. D’ailleurs, c’est plutôt une base-vie où vivent principalement des scientifiques, de façon saisonnière. La population est d’environ une 100aine de personnes. C’est une ancienne cité minière qui s’est reconvertie en centre scientifique de recherche, d’étude et de surveillance de l’environnement. cette endroit est historiquement célèbre, car c’est de Ny-Alesund qu’est partie l’expédition en ballon dirigeable d’Amundsen en 1926 pour atteindre pour la première fois le Pôle Nord et aterrir en Alaska.

Nous faisons donc escale à Ny-Alesund sous i-une bonne neige. L’endroit, bien que mythique, fait vraiment fin du monde. Nous ne croisons pas âme qui vive dans la rue. Nous nous rendons dans la poste la plus septentrionale du monde, qui est également le magasin pour les rares touristes le plus au Nord du monde, nous achetons 3 bricoles, des cartes postales que nous faisons oblitérer sur place pour être sûrs. De vrais touristos sans complexes !! Un petit tour rapide dans les rues ventées, quelques photos sans sortir du périmètre de protection des ours blancs, puis nous regagnons le Polaris. 

Jour 7 et 8 : Sur le chemin du retour

Toujours gris au niveau de la météo… cela ne nous empêche pas de sortir pour deux dernières randos. Nous comptons bien profiter jusqu’au bout. Nous ne nous lassons pas des paysages grandioses et de l’ambiance qui nous entourent. Nous sommes bien conscients de la chance que nous avons de voir tout ça : un renard argenté seul dans cette immensité, nous faisons silence car nos voix portent, des rennes polaires, des oiseaux par millier dans les falaises…  Je kiffe à fond!!!!!

Quelle découverte le Grand Nord : paysages incroyables, inhospitaliers, rudes et pourtant tellement fragiles. Nous rentrons avec une conscience écolo encore plus poussée, persuadés que notre impact sur la planète est très important et qu’il y a une absolue nécessité à changer nos comportements si nous voulons la préserver.

Sur le long retour en bateau qui nous ramène à Longyearbyen (plusieurs heures et notre dernier soleil de minuit) la dernier moment marquant que je garde sont les jets d’eau dûs au souffle d’une baleine et de son baleineau ainsi que sa nageoire caudale replongeant dans l’océan arctique comme un au revoir.