J’avais cette voie en tête depuis 2003. Ça avait été notre itinéraire de descente de la Vaucher, et dans les rappels, je me souviens m’être dit de ne pas oublier ces fissures impressionnantes et belles dalles raides…probablement très dures…

Cet été, je pense avoir le niveau, ayant bien grimpé en salle toute l’année… Maillon Manquant est donc une bonne option parmi tous les projets montagne que j’ai en tête.

Du made in Piola des années 80…

Ce week-end ou Fix doit faire un stage de récup. de points de permis de conduire… C’est l’occasion pour moi de faire une voie d’escalade un peu dure (merci Fix!!) Je n’ai cependant pas envie de m’engager dans une longue course en montagne et aimerai bien grimper “light”.

Comme je m’y prends un peu à la dernière minute, Ricardo n’est pas dispo, Laurent Bibolet non plus… Finalement, Ricardo me met en relation avec un de ses copains guide de Cham, Manu Chance. “Tu vas voir, il est très gentil et super cool…”. Avec un nom pareil, ça ne peut que bien fiter. Rendez-vous est donc pris pour le samedi, la météo est moyenne +, la voie du Maillon Manquant lui semble une bonne idée d’après ce que je lui ai exposé des courses et voies que j’ai déjà faites.

Pour ma part, ça y est, je suis bien dans le truc, je vais me frotter à l’ED… j’en rêve secrètement depuis longtemps… et je ne vais pas être déçue.

Mon plus gros stress est de ne pas me planter dans l’organisation de mon sac et de ne rien oublier, ce serait du plus mauvais effet!!

 

400m, ED-, 6b+>6b>A0

Ça déroule. Les longueurs s’enchaînent bien. A 10h30 on a déjà fait la moitié de la voie. Mais pas la partie la plus dure qui arrive à mesure que le rocher se redresse.

A partir de la 5ème longueur, le ton est donné. Changement de braquet. 6a… pus 6a+, 6b… Les bras en prennent un coup. La sortie du 6a+ est bien athlétique! Le 6b passe plutôt mieux. Même “light” le sac pèse lourd… heureusement on en a pris qu’un seul pour 2; jusque-là je l’ai porté étant en second, mais je crois qu’à la prochaine longueur  je vais le rendre à son propriétaire…

La dernière longueur en 5c est très belle aussi… la promesse du sommet. Elle déroule et enfin nous atteignons le haut de la voie.

Enfin, nous y voici. Le sommet est atteint et le challenge réussi. La météo orageuse et instable nous a laissé un peu de marge.

La vue autour est grandiose sur le sur le sommet du Peigne et face nord des Pellerins. L’arrête des Papillons est bien fournie.

2, 3 photos prises au sommet une bise bien méritée et nous voilà déjà dans la préparation de la descente.

L’orage qui tourne depuis 2 heures au dessus des Aravis et qui est un temps passé derrière le Mont-Blanc, se rapproche sérieusement. Il n’est pas dit que nous passions tous les rappels au sec!!

La voie de 400 mètres se grimpe en 13 longueurs, 6b+>A0, 7a en libre pour une longueur. C’est une voie Piola de la grande époque où il envoyait du bois, partiellement équipée (assez peu même) et récemment rééquipée par lui-même. Le granit est magnifique, la vie toute en fissures avec de belles dalles, très soutenue dans le 6a/b.

Après prise de contact à l’Aiguille, papotage et partage d’expérience, nous voilà partis pour une petite heure de marche d’approche. Le ton est donné, ça bombarde. Au bout de 20 mn, je ne peux plus parler, Manu monologue. Il est effectivement super sympa et a bien la caisse.

Arrivés au névés, quelques marches taillées évitent l’usage des crampons intentionnellement laissés au chalet pour alléger le sac. Sur une première vire confortable, on s’équipe. Il y a du monde, mais la plupart des cordées partent dans la Vaucher dont les 3 1ères longueurs sont communes. Ça va se détendre.

Les premières longueurs sont en 5 et permettent de se chauffer. Tout va bien.

L8 est se grimpe en dulfer, faut être bien tonique. L9 et L10 en 6a dans les fissures et dièdre avant d’attaquer le gros morceau.

L11 en 6b+>A0… en libre c’est intersidéral… d’autant plus qu’une erreur dans le dernier topo granite de Cham et des vieux pitons restés en place nous déroutent de la voie. Au lieu de bien partir à droite, nous prenons une dalle superbe, mais le 7a est bien à cet endroit suivi d’une passage tout droit juste à droite du surplomb. Ouchhhhhh!! une sangle complètement pourrie mais salvatrice est en place pour sortir du surplomb.

Du coup on shunte L12 et on reste dans la difficulté… Mais le plus dur est passé. J’ai un peu “extériorisé” mes émotions…

The good line in the good place. Rocher superbe, voie d’enfer.

Majeure. Le génie Piola.

La descente

La descente s’effectue en 11 rappels. Aussi rapidement qu’il équipe ses relais, Manu prépare les rappels. Ça file et ça défile. Les cordes sont passées et rappelées méthodiquement. Pas de prussic pour ma part.

En 1h30 montre en main les 11 rappels sont libérés, les 2 derniers s’étant effectués sous une bonne pluie.

Nous rejoignons la vire du départ sur laquelle nous avons laissé chaussures et sac.

Le sandwich rapidement avalé, nous redescendons le névé en ramasse et regagnons le Plan de l’Aiguille rapidement.

Un bon panaché nous attend à l’arrivée. Nous retrouvons Lise, la copine de Manu qui est aspirant guide. Je suis impressionnée.

Nous discutons un bon moment avant de rentrer aux Contas. Une top journée!